A l’occasion de la parution « officielle » de mon guide Auto-onctions sacrées – Protocoles pour laisser le Divin agir à travers vous, je vous propose cette semaine un mini-feuilleton sur le renouveau de la pratique ancestrale de l’onction sacrée, revue et corrigée pour nos contemporains, prenant en compte l’évolution spirituelle de l’humanité ainsi que les huiles essentielles actuellement disponibles.

 

 

Voici le premier épisode : comment les odeurs nous relient à Dieu ?

 

Plantes odorantes et lien au divin : une pratique universelle et millénaire

 

Des confins de l’Himalaya aux vastes plaines de l’Amérique du Nord, en Orient, mais aussi en Europe ou encore en Russie, est-il un endroit sur terre où le brûlage de végétaux à des fins de purification n’a pas été utilisé ? Qu’il s’agisse de purifier des temples, des maisons ou des hôpitaux, de chasser la maladie ou les mauvais esprits, d’entrer en contact avec des défunts, des divinités ou d’atteindre soi-même un état modifié de conscience, on utilise depuis la nuit des temps et de manière quasiment universelle, les plantes odorantes, les fumigations de plantes aromatiques, ou encore les huiles essentielles pour leur capacité à nous connecter au divin, pour leur capacité à nous emmener au-delà de notre réalité quotidienne, dans un espace-temps où tout est possible.

 

La méthode chinoise de fumigation veut que le bâtonnet ‒ généralement un fragment de bambou ‒ soit trempé dans l’eau puis dans une poudre de plante adhésive, le plus souvent Gonostegia hirta ou Basella alba. On réhumidifie l’ensemble, puis on le trempe dans de la poudre déshydratée de Pinus yunnanensis (un conifère de la province du Yunnan) qui sert à améliorer la combustion. Après un nouveau bain, le bâtonnet est cette fois trempé dans la poudre d’encens, opération renouvelée jusqu’à ce qu’on obtienne l’épaisseur recherchée. Enfin, les bâtonnets d’encens ainsi réalisés sont pétris pour affiner leur forme et mis à sécher.

 

Dans sa liturgie, le christianisme, dans la continuité de l’Ancien Testament, perpétue l’utilisation de l’encens, puisqu’il fait partie des cadeaux apportés au Christ par les rois mages, avec l’or et la myrrhe. « Voici l’or : c’est un roi », écrit saint Grégoire le Grand dans une homélie sur l’Épiphanie, avant de poursuivre : « voici l’encens : c’est un Dieu ; voici la myrrhe : c’est un mortel ».

Pourquoi l’or ? Toutes les grandes traditions spirituelles de l’Antiquité reliaient l’or au divin. Inaltérable et pleine d’éclat, cette matière est réservée à l’aristocratie, au pouvoir royal, aux fonctions religieuses.

Pourquoi la myrrhe ? La myrrhe était recherchée par les anciennes civilisations pour son parfum. Les Hébreux s’en servaient pour fabriquer l’huile d’onction sainte des prêtres. Mélangée à du vin, la myrrhe en augmentait la vertu euphorisante et, selon une coutume juive, ce breuvage était parfois proposé aux suppliciés pour atténuer leurs souffrances, ce qui fut justement le cas pour Jésus (MC 15, 23). Utilisée pour embaumer les morts, elle servit également à préparer la dépouille mortelle du Christ comme nous le raconte l’Évangile selon saint Jean : « Nicodème – celui qui, au début, était venu trouver Jésus pendant la nuit – vint lui aussi ; il apportait un mélange de myrrhe et d’aloès pesant environ cent livres. Ils prirent donc le corps de Jésus, qu’ils lièrent de linges, en employant les aromates selon la coutume juive d’ensevelir les morts. » Deux usages qui rappellent l’humanité de Jésus, dès le commencement de son existence terrestre.

Pourquoi l’encens ? Fréquemment utilisé dans les cultes aux divinités dans les civilisations assyrienne et égyptienne, l’encens était l’un des biens les plus précieux. Romains et Grecs le tenaient également en haute considération. L’encens avait alors une valeur équivalente voire supérieure à l’or. Attribut du divin, l’encens des rois mages salue dans le nouveau-né de l’humble crèche, et au-delà des trompeuses apparences, un Dieu.

 

 

En plus de la messe, l’encens est utilisé lors des funérailles, des expositions du Saint Sacrement, lors de certaines processions, lors des vêpres solennelles au moment du chant du Magnificat. En montant vers le ciel, les fumées sacrées de l’encens portent les prières des fidèles : « Que ma prière devant toi s’élève comme un encens », dit le psalmiste (Ps 140, 2).

 

Les Mayas se servaient du copal blanc (Copaifera officinalis), une résine semi-fossile pour honorer leurs divinités, de même que les Incas pour célébrer le dieu soleil. Le mot « copal » est un terme issu du nahuatl et signifie « encens » dans cette langue. Brûlé, le copal était considéré comme un instrument de vision pour les Mayas et considéré comme une forme de protection contre la sorcellerie, la maladie et le malheur. Le copaïba, appelé aussi baume de copahu, ou encore baume d’Amazonie, est une oléorésine obtenue après distillation de cette résine qui exsude, après incision, du tronc du copaïer. Une fois la résine distillée à la vapeur d’eau, on obtient une huile essentielle, ou plus exactement une oléorésine, composée d’un mélange naturel d’huile végétale et d’huile essentielle, d’où son appellation de « baume ». Aujourd’hui listé dans la pharmacopée française et européenne comme plante médicinale, le baume de copahu possède une action anti-inflammatoire puissante et prolongée. Il est utilisé en application externe depuis des temps immémoriaux par les populations d’Amazonie pour se soigner.

 

Dans l’Egypte antique, on produisait une sorte de parfum sous forme solide, appelé kyphi et considéré comme un encens sacré. Les Egyptiens le faisaient brûler en l’honneur du dieu solaire, Rê qu’ils vénéraient. Cette appellation d’encens recouvre diverses recettes comprenant entre dix et cinquante ingrédients, comme le miel, la cannelle, la myrrhe et le bois de santal. Ses propriétés sont réputées bienfaisantes et il aurait des vertus apaisantes : « mélangé à des boissons, il est prescrit dans les affections pulmonaires et hépatiques. Cuit avec du miel, il est conditionné en pastilles pour garder l’haleine fraîche ». Pour la bonne santé, il est appliqué en invoquant le dieu soleil Ra. Ce parfum rappelle ainsi que la pharmacopée égyptienne tirait l’essentiel de ses remèdes (potions, gargarismes, infusions, cataplasme, pilules…) des résines et des herbes odoriférantes3. Diverses tentatives modernes de reconstitution du kyphi ont été entreprises. La parfumeuse Sandrine Videault s’est inspirée d’un texte de Plutarque et de représentations des temples d’Edfou et de Philae, complétées par des données égyptologiques et botaniques, pour créer un kyphi composé de seize ingrédients. Puisque nous en venons à aborder la question des sources, la plus ancienne référence connue au kyphi provient des textes des pyramides où il apparaît dans la liste des éléments dont le roi pourra profiter dans la vie de l’au-delà. Plutarque évoque ainsi les effets du kyphi dans ses Œuvres morales : « Il s’en exhale une vapeur suave et profitable, qui change les conditions de l’air. Cette vapeur s’insinuant dans le corps au moyen du souffle, le berce d’une manière douce et insensible, l’invite au sommeil, et répand autour de lui une influence délicieuse. Les soucis journaliers, qui sont comme autant de chaînes si pénibles, perdent de leur douleur et de leur intensité ; ils s’affaiblissent et se relâchent, sans le secours de l’ivresse… De cette manière se charment et s’adoucissent les troubles et les désordres de l’âme. »

 

Le lien entre le divin et les bonnes odeurs est manifeste. Les temples égyptiens n’étaient pas uniquement des lieux de prière, il s’agissait aussi de la demeure terrestre du dieu, où il avait choisi d’habiter sous la forme d’une statue. Afin de susciter leur bonne humeur et leur bienveillance, les prêtres se purifiaient tous les matins avant de procéder à la « toilette » de la statue. A cet effet, chaque sanctuaire possédait son atelier de parfumerie dans lequel on préparait des huiles sacrées destinée à l’onction de la statue du dieu. Ce lien entre le sacré et les odeurs est même imprégné dans la langue égyptienne. Le mot sntr (prononcé sonter), utilisé pour désigner les gommes et résines odoriférantes était toujours précédé d’un déterminatif de Dieu, si bien qu’on a proposé de le traduire par « divine odeur » ou « odeur qui plait à Dieu ». Dans le papyrus d’Harris, Ramsès III déclare ainsi : « J’ai planté des arbres à sntr (odeur divine) sur ton esplanade (à Thèbes) ».

 

Dans ce même ordre d’idées, les Egyptiens embaumaient leurs morts, non seulement pour masquer la mauvaise odeur, mais surtout afin de leur assurer l’accès à la vie éternelle, leur donnant les forces divines qui permettaient aux bienheureux d’entrer dans le monde des dieux. Le châtiment suprême dans l’ancienne Egypte consistait à priver les coupables de sépulture. Il est dit aussi que Dieu a fait enduire le corps d’Adam par les archanges d’une « huile de bonne odeur » avant de l’ensevelir, pour lui permettre de ressusciter au dernier jour.

 

L’utilisation des parfums, huiles et plantes odorantes afin de se relier au divin n’était pas l’apanage exclusif des Egyptiens. De très nombreux passages de l’ancien comme du nouveau Testament en témoignent. Dans le livre de l’Exode, on trouve : « Aaron fera fumer l’encens sur l’autel ; il le fera fumer chaque matin, lorsqu’il préparera les lampes. Et quand Aaron replacera les lampes, au crépuscule, il le fera encore fumer » (Exode 30.7).

 

Si les bonnes odeurs, notamment grâce à l’onction à l’aide d’huiles et de baumes odorants renforcent le lien au divin de la terre vers le ciel (élever son esprit, demander la guérison), cette dernière pratique joue également un rôle dans le lien au divin, mais du ciel vers la terre cette fois-ci. L’onction peut être utilisée, dans certaines conditions, afin de conférer un pouvoir spirituel et/ou temporel sur terre.

 

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